Les résultats récents de l'enquête nationale 'EnCLASS' révèlent que 14% des élèves de collège et 15% des élèves de lycée présentent un risque important de dépression et que la proportion d'élèves de collège percevant leur santé mentale comme excellente a connu une baisse significative ces dernières années.
Ce mal-être grandissant, chez les adolescents et les jeunes, est aussi constaté par les équipes éducatives des séjours. L'UCPA souhaite lutter contre les préjugés sur la santé mentale et former ses équipes pour qu'elles puissent accompagner au mieux les jeunes accueillis pendant les vacances.
La santé mentale des jeunes : la nécessaire mobilisation des acteurs éducatifs
L'UCPA et les Scouts et Guides de France, deux associations d'éducation populaire, ont organisé le 13 novembre dernier un temps de partage d’expériences avec d’autres structures et des experts et expertes de la santé mentale des jeunes.
“La santé mentale des jeunes s’est dégradée ces dernières années. Ce qu’on constate, c’est que jamais les niveaux de bien-être et de santé mentale d'avant la pandémie n'ont été retrouvés, et notamment chez les jeunes filles.” , explique Emmanuelle Godeau, enseignante-chercheuse, responsable de la filière de formation des médecins de l’éducation nationale, EHESP.
Les causes de la dégradation de la santé mentale des ados sont multiples. Si certaines trouvent leur racine dans la crise climatique, la pandémie de Covid 19 ou l’usage des réseaux sociaux, les principales causes sont souvent liées à l'absence d'un adulte de confiance ou à un manque affectif. C’est au collège que la santé des ados se dégrade le plus selon l’étude ENCLASS. Ce qui a changé et que l'on constate aujourd'hui dans nos colonies, c'est que la santé mentale n'est plus un sujet tabou. Les jeunes s'expriment davantage et mettent des mots sur leurs malaises. Ce constat, Emmanuelle Godeau le partage : “Aujourd’hui, plus qu’avant, les adolescents se sentent autorisés à nous dire qu’ils ne vont pas bien et à en parler. A présent à nous en tant qu’adulte d’en faire quelque chose”.
L’UCPA a envoyé un questionnaire à ses équipes d'animation afin de recueillir des informations sur les situations liées à la santé mentale des jeunes rencontrées en colonie.
Sur 240 réponses :
- 74,5% ont déclaré avoir géré une ou plusieurs fois des jeunes faisant des crises d’angoisse,
- 72% ont indiqué avoir déjà été confrontés à un jeune ou une jeune pour qui la gestion des émotions est particulièrement difficile et 44% ont rencontré des jeunes qui s’isolent,
- 59% ont demandé à être davantage outillés et formés pour accompagner les jeunes accueillis.
À travers les regards croisés des expertes et experts du sujet, les rencontres du 13 novembre ont permis de mieux comprendre l'origine et l'ampleur des défis à relever par les adultes et tous les acteurs éducatifs, y compris les associations de l'éducation populaire œuvrant auprès des jeunes. Prendre en compte la santé mentale des adolescents dans les pratiques éducatives, prévenir, identifier et accompagner les jeunes concernés est une priorité partagée. Les ateliers organisés à cette occasion ont permis des échanges sur des outils de prévention, des actions de formation et des bonnes pratiques développées par plusieurs structures impliquées dans l'éducation ou la prise en charge des jeunes.
La santé mentale des jeunes : des initiatives pour une meilleure prise en charge en colo
En tant qu'acteur éducatif, l'UCPA s'investit pour une meilleure santé mentale des jeunes, et pour leur bien-être de manière générale. L’association travaille avec ses équipes d’animation sur le sujet afin de proposer des pistes de solutions concrètes en colonie, comme la place du jeu libre ou des relations sociales entre pairs.
- Pour les plus jeunes
Cette attention à la santé mentale passe par l'apprentissage de la gestion des émotions, ainsi que par une réflexion sur la place du jeu libre. En effet, les temps libres sont de moins en moins préservés lors des colonies : les programmes d'activités ont tendance à se surcharger, à la fois dans l'idée de contenter les parents qui veulent offrir toujours plus à leurs enfants et aussi avec l'objectif d'occuper les enfants quasiment à 100%. Un rythme d'activités que la plupart des adultes auraient parfois du mal à tenir !
« Les vacances sont une opportunité de lâcher la bride. Il faut [leur] donner des temps de liberté. Un peu de souplesse ne fait pas de mal.», explique la psychologue Béatrice Copper-Royer.
L'importance de ces temps libres, que ce soit à la maison ou durant la colonie, a été prouvée par plusieurs études (dont Decline in Independent Activity as a Cause of Decline in Children's Mental Well-being). La maîtrise du jeu par l'enfant, sans guidage de l'adulte, lui permet de se tester, de chercher des solutions par lui-même et de gagner en confiance.
- Pour les ados
L'UCPA souhaite offrir à ses équipes d'animation une formation sur la gestion de certains troubles, tels que les troubles alimentaires, les troubles dépressifs, les troubles émotionnels, les mutilations, ou encore, le harcèlement. Notre association se fait accompagner par des professionnels expérimentés comme Intervention du 119, E-enfance, Silence des justes… Plusieurs personnes seront également formées par l’association Premiers Secours en Santé Mentale.
En plus de ces formations spécifiques, l'approche pédagogique de l'association a pour objectif d'améliorer le bien-être des jeunes en répondant à leurs besoins fondamentaux liés à leur âge, notamment : de créer des liens et des relations positives entre jeunes, d'être écouté par un adulte de confiance, de se sentir appartenir au groupe et d’y trouver sa place, ainsi que de connaître des réussites et d'être valorisé dans un autre domaine que l'école.
“Les activités de loisirs avec des copains, les activités en groupe, les activités encadrées et le plein air favorisent le bien-être des jeunes. On sait que les relations sociales, le soutien social, que ce soit entre pairs ou avec des adultes de confiance sont liés à une meilleure santé mentale.”, explique Emmanuelle GODEAU, enseignante-chercheuse, responsable de la filière de formation des médecins de l’éducation nationale, EHESP.
Les groupes d’amis sont importants car ils permettent aux ados de s’affirmer à travers des interactions. La psychologue américaine Judith Rich Harris va même jusqu’à émettre l'hypothèse que le développement de l’adolescent est davantage influencé par la socialisation avec les pairs que par l’éducation des parents.
En colo, l’équipe d’animation instaure une proximité et une relation de confiance avec les jeunes, qui s’avère vraiment différente et complémentaire de ce qu’ils connaissent à l’école ou dans le cadre familial. L'équipe d'animation est également là pour échanger sur des sujets plus délicats et proposer un espace d’expression et d’écoute bienveillant.
Un kit pédagogique à destination des équipes d’animation comprenant un guide, un livre et des jeux est prévu pour l'été 2026. Ce nouveau kit a pour objectif d’instaurer un cadre bienveillant et sécurisant, de favoriser les temps d’échange avec les jeunes sur des sujets qui les animent et d’organiser des grands jeux thématiques. Cette approche a déjà été testée et approuvée par les équipes pour des sujets comme le numérique, la mixité, le consentement, le rapport au corps et l'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, ainsi que la transition écologique.
Agir pour améliorer la santé mentale des jeunes est une nécessité, c'est la responsabilité de tous les adultes qui les entourent. L'UCPA s'engage aussi et petit à petit outille, sensibilise et forme ses équipes d'animation pour une plus grande écoute et un meilleur accompagnement des jeunes accueillis en séjours.